Pr. Khalifa CHATER
“J'ai dit au Bey, en plaisantant, alors que je respirais l'air de la liberté, que je me désaltérais dans ses eaux et que mes pieds foulaient son sol :
- Vous avez raison d'avoir la nostalgie du pays. Quand vous entrez par Bab-Alioua, vous pouvez agir comme bon vous semble. Ici, par contre, vous êtes un homme ordinaire....”(Conversation entre le ministre Ben Dhiaf et Ahmed Bey, au cours de son voyage en France, en 1846[1]).
Le déclin de l'empire ottoman et son repli territorial, la campagne d'Egypte (1798 - 18O1), l'expédition d'Exmouth contre les régences d'Alger, de Tunis et de Tripoli (1816) et l'occupation d'Alger (1830), révélaient que les rapports de forces étaient, désormais, favorables aux puissances occidentales. Faisant partie, par sa proximité, de l'aire d'expansion immédiate de l'Europe, la Régence de Tunis était bel et bien menacée. Prenant conscience de leur retard, les beys tunisiens décidèrent de suivre l'exemple européen et optèrent, dans de nombreux domaines, pour «l'emprunt à l'Occident» qui suscitait, paradoxalement, leur méfiance et leur adoration. La modernisation de l'armée, c'est-à-dire la création d'une armée nizamie à l'européenne, s'inscrivait dans les priorités identifiées par Hussein et Ahmed Bey. Face au péril imminent, il devenait urgent de renforcer le dispositif de défense et d'engager une politique volontaire de modernisation.
Cette intuition des dirigeants anticipait l'action de formulation, de définition et de théorisation des réformateurs idéologues (Mahmoud Kabadou, Ben Dhiaf, Khéréddine etc.). Le décalage entre l'action politique et sa théorisation, dans le domaine de «l'emprunt à l'Occident», la modernisation de l'armée et les velléités d'industrialisation permettaient de redimensionner l'action des idéologues des réformes qui ont émergé à l'ombre d'un pouvoir conscient des nouveaux enjeux de la conjoncture. L'action des ouléma(s) - réformateurs (Mahmoud Kabadou, Ahmed Ben Dhiaf, Khéréddine) avait pour objectif, d'expliciter ces programmes, de les définir, de les analyser et surtout de les légitimer, par rapport à la chariaâ, le droit musulman. Leurs écrits qui traduisent un changement de perspective, par rapport à la pensée dominante attestent l'émergence d'un nouveau paradigme, que nous appelons “l'idéaltype des Lumières”. Les mutations de “La perception de l'autre” s'inscrit dans ce nouveau paradigme.
Certes le paradigme traditionnel, c'est-à-dire “la conscience de la pratique existante[2]”, reste dominant.. Les oulémas tunisiens, tels Mohamed Ben Slama restèrent fidèles à leurs schémas de pensé, à leur référentiel traditionnel.
I - « L'idealtype des Lumières » et son adoption comme idéologie de progrès : Nous empruntons ce concept, tel qu'il est défini par Max Weber, pour appréhender la démarche de l'intelligentsia éclairée, qui a défendu et légitimé les projets de modernisation engagés par l'Establishment tunisien. «L'idealtype, précise Max Weber est un tableau de pensée; il n'est pas la réalité historique ni surtout la réalité authentique, il sert encore moins de schéma dans lequel on pourrait ordonner la réalité[3]».
- a) L'approche des réformateurs tunisiens : Dans le cas des réformateurs tunisiens, l'idealtype des Lumières définit un projet de société, un objectif à atteindre. Une telle construction idealtypique nourrit des espoirs, définit des objectifs, engage une nouvelle lecture du référentiel et remet en cause la pensée dominante. Il constitue ainsi une force agissante bien réelle.
Revenons au concept des Lumières. Pour l'intelligentsia tunisienne et arabe, il dépasse la définition consacrée “qui désigne le XVIIIe siècle, en tant que période de l'histoire de la culture européenne, marquée par le rationalisme philosophique et l'exaltation des sciences, ainsi que par la critique de l'ordre social et de la hiérarchie religieuse[4]”. Les réformateurs tunisiens, qui n'ont pas eu l'opportunité de lire les œuvres des philosophes des Lumières, n'ont qu'une connaissance schématique de la pensée du XVIIIe siècle (rationalisme, progrès, tolérance, liberté, rejet de la monarchie de droit divin, séparation des pouvoirs, égalité, etc.). Mais les voyages fréquents qu'ils ont effectués dans certains pays européens et les relations des consuls et des commerçants européens ont contribué à la construction d'une vision idéalisée, confortée par les résultats spectaculaires des armées européennes, lors des campagnes d'Egypte, de Turquie et d'Alger. Les nouveaux rapports de forces expliquent cette quête d'un modèle alternatif, outre-Méditerranée. Ce renversement de perspective, fut-il atténué par un judicieux travail de synthèse ! doit être apprécié, à sa juste valeur. Mais l'examen des écrits des réformateurs tunisiens montrent qu'ils sont attachés à l'esprit sinon à la lettre de la pensée des Lumières, ou plutôt qu'ils apprécient les conséquences de cette démarche sur le vécu de certains pays européens.
b - Le manifeste de Kabadou (1814 ? - 1871) : Mahmoud Kabadou, qui enrichit son cursus zeitounien par son séjour à Istanbul et son travail au sein d'une institution universitaire moderne avec des experts étrangers[5], fut le véritable maître à penser des réformateurs tunisiens, leur demandant de réviser leurs approches, d'adapter leurs lectures des textes d'autorités aux exigences du contexte, faisant valoir l'importance du défi qu'ils doivent affronter.
La dibaja[6], publiée en 1844, en guise de préface à la traduction du Précis de l'art de la guerre du baron Henri de Jomini, par les élèves de l'École Polytechnique du Bardo, sous la direction de Calligaris constitua, à notre connaissance, le texte fondateur de l'idéaltype de réformes, des Lumières et du progrès. Mahmoud Kabadou constate le déclin des musulmans et le réveil des « infidèles» grâce aux inventions scientifiques, particulièrement dans le domaine militaire. Constatant ce décalage qui s'expliquait, par l'intérêt que les Européens portaient aux mathématiques et aux sciences, le lettré tunisien demanda aux musulmans de mobiliser leurs efforts et de s'adonner à l'étude des sciences pour rattraper le retard. Il cite, à l'appui de son argumentation, ce verset coranique : “Est-ce que ceux qui savent et ceux qui ne savent pas se valent” (verset 8, sourat 39). Se réfèrant à l'âge d'or de l'histoire musulmane, pour y puiser des exemples d'emprunt à l'étranger, il affirme courageusement que “le musulman recherche la sagesse là où il la trouve...”. Kabadou a eu le grand mérite de faire valoir la dimension de l'Ijtihad[7] qui légitime la pensée tunisienne novatrice. Nous considérons ce traité, comme une fetwa[8] globale, au service d'une renaissance revendiquée.
- c) Le manifeste de Khéreddine (1867) : Acquis à cet idealtype des Lumières, Khéredine[9] devint, du fait de son statut au sein de l'Establishment beylical, de son rayonnement et des enseignements de ses séjours à l'étranger, le chef de file de ce courant. Son niveau scolaire l'incitait, en toute logique, à s'en remettre à son équipe, pour la documentation, la quête du référentiel religieux et, bien entendu, la rédaction finale[10]. Mais sa signature de l'œuvre devait lui assurer la promotion requise. Le manifeste fut publié, presque simultanément, en arabe et en français et connut une assez grande diffusion[11]. Notons, d'autre part, que Khéreddine se propose de présenter un diagnostic général du monde musulman, en vue d'assurer sa renaissance.
Les objectifs de l'œuvre sont définis, dans la préface[12]. Khéreddine présente son manifeste comme le résultat d'une longue méditation “sur les causes du progrès et de la décadence des sociétés anciennes et modernes”. Il estime nécessaire de “connaître ce qui se passe chez les autres” et d'abord dans l'environnement proche et de tirer profit de leurs expériences. Prenant conscience des profondes mutations qui s'opèrent “au milieu du mouvement général des esprits et dans 1'état actuel des nations qui rivalisent entre elles, dans la recherche du bien et du mieux”, il estime que l'ouverture est, désormais, inévitable.
Khéreddine adresse son message aux oulémas et aux hommes politiques pour les mettre “à même de connaître ce qu'il importe de savoir à présent sur l'état politico-économique des nations européennes” et de leur montrer “les moyens qu'elles ont employées pour atteindre le haut degré de progrès et de prospérité dont elles jouissent maintenant[13]”. Il met à nu la contradiction de certaines élites qui refusent de s'inspirer des institutions politiques européennes, tout en achetant leurs produits, aux détriments de l'économie du pays [14]. Pour réaliser l'idealtype des Lumières, Khéreddine affirme que la réforme du système politique, selon l'exemple européen, est une question essentielle :
“Pouvait-on acquérir les prédispositions requises (à notre promotion), sans réaliser l'avancée dans les connaissances et les conditions du oumran (développement humain) observées chez autrui ? Un tel progrès ne peut être obtenu sans réformes politiques, similaires à celles adoptées ailleurs et qui se fondent sur la justice et la liberté, qui sont les piliers de notre religion. Elles assurent la force et la droiture dans tous les Etats[15]”.
Pour légitimer ces réformes, Khéreddine affirme que la consultation (choura) est un principe fondamental dans la chariaa et érige les élites (ahl al-hal wal akd), en contrepoids salutaire au pouvoir. “Sache, dit-il, que les âmes sont attachées par nature à la liberté et à la résistance à l'oppression des rois[16]”. A l'appui de sa thèse, son discours conjugue la lecture de l'histoire de l'Etat mohammédien, où il y puise des exemples, et la lecture d'œuvres musulmanes et européennes. Il privilégie ses références à Ibn Khaldoun et à son célèbre principe “l'oppression détruit le oumrane[17]”. Remettant implicitement en cause la thèse des conservateurs qui fondent leur argumentation par leur référence à la tradition, Khéreddine estime que “le développement du oumrane, de la richesse et de la puissance militaire de l'oumma musulmane était fondé jadis sur la justice, la cohésion, la solidarité entre les provinces et l'intérêt accordé aux sciences et aux métiers. Les Européens ont, par la suite, suivi l'exemple des musulmans[18]”.
Cette thèse est corroborée par une relation historique, qui retracer “la marche de la civilisation en Europe, depuis Charlemagne jusqu'à l'époque actuelle[19]”, présentant, comme repères de cette évolution, les principales découvertes et inventions (machine à vapeur, hélice, montgolfière, métier à tisser etc.). Nous nous rendons compte que l'approche de Khéreddine prend en considération les différents aspects économiques et politiques, qui lui paraissent solidaires, à la suite de ses observations européennes. Il préconise, ainsi, un changement global, qui dépasse le champ du politique ou du culturel identifiant, grâce aux modèles européens, un projet de société nouvelle, qui concilie la prise en compte du modèle européen et le respect des sources d'autorité de l'Islam. Dans cette perspective, les réformes politiques sont, d'après lui, essentielles pour créer le contexte d'un développement global, susceptible d'assurer la renaissance du monde musulman.
Fondées sur des réflexions inspirées par la connaissance des sociétés européennes, les démonstrations des réformateurs tunisiens (Kabadou, Khéreddine, Ben Dhiaf etc.) s'inscrivent dans l'idealtype des lumières. Ils puisent, d'ailleurs, des exemples dans l'histoire occidentale. D'autre part, les réalisations économiques et institutionnelles qu'ils ont appréciées au cours de leurs voyages sont souvent érigées en modèles. De ce point de vue, les approches des réformateurs représentent un moment de rupture avec la pensée traditionnelle.
II - La praxis de Ben Dhiaf : Ben Dhiaf représente «l'intellectuel organique», qui fera valoir son adhésion à l'idealtype des Lumières, dans l'exercice de ses fonctions de Bach-Kateb (ministre-rédacteur auprès des beys régnants), alors que les réformes étaient à l'ordre du jour[20]. Après avoir participé à la rédaction des textes fondateurs du régime constitutionnel, il prend ses distances et se retire des instances gouvernementales, consacrant son temps à la rédaction de son œuvre historique[21] ou il explicite sa pensée libérale, objet de notre troisième chapitre.
- a) Naissance d'une pensée libérale : Vivant dans l'aisance, puisque son père était proche collaborateur du ministre influent Youssef Sahab at-Tabaa, Ben Dhiaf fut marqué, durant son enfance, par l'arrestation de son père et la confiscation de ses biens, à la suite de l'exécution de ce ministre, le 29 janvier 1815. Recueillie par le grand-père maternel, la famille vécut dans des conditions précaires cette dure épreuve. Ben Dhiaf prit ainsi la juste mesure des effets du pouvoir absolu[22]. Citons un deuxième repère significatif sinon un incident de parcours de la vie professionnelle de Ben Dhiaf. Recruté comme Kateb (secrétaire), auprès du bey Hussein, il le choqua par l'emploi d'un mot malheureux, contraire aux usages. Il osa, en effet, émettre un jugement, lors de la plainte du Consul de Naples, en 1833, à la suite de la punition de certains de ces coreligionnaires, au service du Bey : “Le travail salarial, dit Ben Dhiaf, n'implique pas la correction corporelle, alors que (ces gens) étaient libres”. La prononciation du mot liberté provoqua la colère du Bey, qui convoqua le père, pour l'informer de la gravité de l'outrage[23].
Nous nous rendons compte, ainsi, que Ben Dhiaf transgresse la culture traditionnelle et s'ouvre progressivement aux nouveaux concepts de l'idealtype des Lumières. Le lettré prenait connaissance, par les relations des voyageurs tunisiens et les discussions avec des membres du corps consulaire, de ce qui se passait, dans certains pays européens. Sa lecture de livres de la nahdha[24] égyptienne, le familiarisait avec la culture politique libérale française[25]. Son voyage à Paris, en 1846, accompagnant Ahmed Bey, lui permettait de mettre ses représentations à l'épreuve des réalités. Il idéalisa ce vécu parisien, sans nuances et sans prise de distance. Sa relation du voyage confortait, d'ailleurs, son adhésion à l'idealtype des Lumières, qu'il intégrait dans son projet politique libéral :
“Celui qui emprunte cette route (entre Toulon et Paris) discerne la signification du Omrane[26] et l'image du progrès, dans les domaines de la civilisation et les conséquences de la sûreté et de la sécurité. On ne risque pas d'y trouver des terres non cultivées (puisqu'elles étaient) arrosées par les pluies de la justice et les riches ruisseaux, qui en coulent à flots [27]... ”
- b) L'intellectuel «organique» : Rédacteur des principales correspondances officielles et des textes des réformes, Ahmed Ben Dhiaf conjugue avec adresse sa connaissance du référentiel musulman et les nouveaux concepts de la politique libérale, qu'il introduit dans le discours beylical. L'analyse de ses écrits montre qu'il adopte les nouveaux concepts, sans rupture avec la culture musulmane, par le recours à une relecture intelligente des textes d'autorité et la prise en compte des nécessités. Il remet ainsi en vigueur la méthode de l'Ijtihad et la revendique[28]. La circulaire fiscale qu'il rédigea, au nom d'Ahmed Bey, le 4 juillet 1840, adopte un nouveau langage politique. L'introduction de ce texte, la référence à l'autorité divine, annonce un changement de paradigme : “Au nom de Dieu, écrit Ben Dhiaf, qui lia le oumrane à la politique des croyants, diversifia ses jugements selon ses volontés et assura, en relation avec les mutations de leurs conditions, les questions de l'ijtihad, ne la limitant guère à ce qui est coutumier et usuel”. Il fait valoir le recours à l'ijtihad novateur, susceptible d'adapter les lois aux nécessités du contexte. La réforme préconisée est d'ors et déjà justifiée, légitimée : “Les règlements, affirme le texte, en préambule, évoluent selon les contextes et changent selon la diversité des actions[29]”. Nous remarquerons, dans cet ordre d'idées, que Ben Dhiaf intègre et/ou re-actualise dans les écrits officiels des beys les concepts de watan (dans le nouveau sens de patrie), oumrane, justice, égalité, intérêt des sujets etc., ce qui atteste des influences évidentes de la nouvelle culture politique.
La rédaction du texte condamnant l'esclavage et abolissant la traite[30] est une véritable fetwa (consultation juridico-religieuse), utilisant la méthode de l'ijtihad, pour légitimer une réforme libérale[31]. Pour abolir une institution bien établie dans l'État musulman, interdire ce qui est toléré, Ben Dhiaf rappelle que l'islam considère la libération des esclaves comme un grand acte de charité, mettant ainsi en valeur l'itinéraire de liberté de cette religion. Son argumentation s'inscrit dans le respect de l'esprit de la loi, sinon sa lettre. D'autre part, le texte abolitionniste évoque comme objectif de rendre service aux pauvres esclaves, dans leur vie présente et d'éviter à leurs propriétaires des châtiments dans l'au-delà étant donné que la plupart d'entre eux ne se conduisent pas avec leurs esclaves selon les recommandations de l'Islam. Pour exécuter la volonté de son prince, lui permettre de se conformer à l'esprit du temps, Ben Dhiaf re-investit la fetwa traditionnelle d'une mission de réformes, de progrès et d'émancipation, démontrant ainsi que l'idealtype des Lumières rejoint l'esprit libéral de l'Islam[32].
- c) Le Pacte Fondamental (1857) : Fait d'évidence, les réformes constitutionnelles furent recommandées, imposées même par les puissances européennes, dans le cadre de leur politique d'expansion commerciale, pendant l'ère précoloniale. Ne surestimons pas l'action du courant libéral tunisien. Les réformateurs qui représentaient une faible minorité de l'élite ont tout simplement pu accompagner le mouvement, le défendre et le légitimer. Proche collaborateur des beys régnants, fin connaisseur des textes d'autorité de l'Islam, Ben Dhiaf a participé activement à la rédaction des textes fondateurs, intégrant les exigences des consuls, mettant en valeur les mesures libérales, dans un discours réformateur musulman.
Promulgué le 9 septembre 1857, le Pacte Fondamental est une déclaration des droits des sujets du bey et de tous les habitants de la Régence: Il garantit la sécurité pour tous, établit l'égalité devant l'impôt et devant la loi et annonce une ré-organisation du service militaire. Ce souci de la puissance publique de protéger les droits individuels, rejoint la réflexion politique du XVIIIe siècle. Confirmant la liberté commerciale, le Pacte Fondamental institue des tribunaux commerciaux et criminels mixtes et accorde le droit de propriété aux juifs et aux étrangers. Fait important, il remet en cause, de fait, le statut de "dhimmis[33]", ou protégés des non-musulmans, qui étaient l'objet d'une discrimination fiscale[34].
L'Establishment religieux trouva les clauses égalitaires, conformes aux normes de la religion. Mais ils n'approuvaient pas les droits accordés aux non-musulmans et aux colonies européennes. C'est ce qui entraîna le retrait des oulémas de la Commission d'explication du Pacte Fondamental, après avoir approuvé la première clause, garantissant les droits individuels de tous les habitants[35]. Soutenant, sans réserves, le Pacte Fondamental, Ben Dhiaf affirma qu'il “constitue une grande œuvre, qui sera longtemps citée par les fils de la patrie[36]”.
Confirmant sa prise de position, en faveur de l'établissement de l'égalité des droits des Tunisiens, il défend le décret d'application du Pacte, du 14 septembre 1858, autorisant les juifs à porter la chéchia rouge, à acquérir des biens et à s'adonner à l'agriculture :
“Il s'agit, affirme-t-il, d'un acte établissant l'égalité, en application du Pacte Fondamental ou plutôt par application du principe de l'équité et les nécessités de contexte historique, étant donné que l'imposition d'un costume (discriminatoire) aux dhimmis ne relève pas des principes fondamentaux de la religion[37]”
Rappelant que le prophète n'a pas imposé de costumes discriminatoires aux juifs de Médine et affirmant que cette pratique a été instituée lors du déclin du califat abbasside, Ben Dhiaf dénonce énergiquement “les ignorants de la capitale, qui ont considéré que ”cette mesure annonce la fin du monde, ne réalisant pas que le déclin du pays s'explique, dans une large mesure, par l'oppression de nos dhimmis et l'abandon de la recommandation de notre prophète (en leur faveur[38])”. Nous évoquerons, dans ce même ordre d'idées, les prises de positions de Ben Dhiaf, en faveur de l'amélioration des conditions des juifs tunisiens (statut, charge gouvernementale[39], prise en considération de leurs témoignages[40]). Rejetant toutes velléités discriminatoires, il appelle les juifs «nos frères dans la patrie[41]».
- d) La Constitution ou Qanoun : Complétant les réformes législatives initiées par le Pacte Fondamental, la constitution de 1861, promulguée en janvier 1861, devait mettre fin à la monarchie absolue[42]. Rédigé par Ben Dhiaf, le discours présentant la constitution aux hommes du charaa, aux ministres, aux officiers et aux membres du Conseil municipal de Tunis, le 19 août 1860, justifiait ses principes fondateurs et la création des institutions qu'elle instaurait : le Conseil suprême et les tribunaux, par “les nécessités du contexte ... et les intérêts politiques[43]”. Au cours d'une deuxième cérémonie solennelle, le 26 novembre 1860, le discours prononcé au nom de Sadok Bey et rédigé par Ben Dhiaf, rappelait les objectifs de la Constitution, estimant qu'elle “assurait les conditions nécessaires au développement du oumrane”, affirmant même que “le Qanoun (la constitution) a permis de civiliser les pays” et qu'il était, en tout cas, “devenu, vu le contexte et la situation, une obligation[44]”. La considération du contexte devenait un leitmotiv du vocabulaire de Ben Dhiaf, justifiant implicitement le recours à des relectures des textes d'autorité, pour faire face aux défis du présent. Fait novateur le discours de Khéreddine, rédigé par Ben Dhiaf, remercie le bey, pour “l'octroi de la Liberté, qui constitue pour l'espèce humaine la plus chère aspiration[45]” Ce nouveau langage constitue, bel et bien, une adhésion à l'idealtype des Lumières.
III - De la praxis à la théorie : L'Ithaf, l'œuvre maîtresse de Ben Dhiaf, présente l'histoire générale de la Régence de Tunis, consacrant ses huit chapitres aux différents beys depuis Hammouda Pacha (1788 - 1814) et résumant les périodes antérieures. En fait, la relation historique de Ben Dhiaf est, bel et bien, "idéologisée", puisqu'elles ont, comme objectif de justifier son adhésion aux textes constitutionnels, réformant le système politique tunisien.
- a) La lecture historique de Ben Dhiaf : A partir d'un repère qu'il célèbre et commémore, à savoir la promulgation de la déclaration des droits du Pacte Fondamental de 1857, Ben Dhiaf présente une relecture de l'histoire tunisienne, expliquant ses réussites et ses déboires, par l'application des paramètres que l'idealtype des Lumières induit[46]. Prenons quelques exemples :
Relatant l'histoire de la dynastie hafçide, évaluant les étapes de sa grandeur puis de sa décadence, Ben Dhiaf cite, pour expliquer son déclin et sa chute “l'abandon des vertus, les conduites immorales, les actions répréhensibles[47]”. Tout en adoptant le schéma de pensée d'Ibn Khaldoun, il relativise sa théorie des cycles des Douwal(s), les Etats-dynasties, de la naissance, à l'apogée et à la vieillesse, estimant que la décadence n'est pas inéluctable, évoquant comme argument, l'histoire de l'empire ottoman, ne réalisant pas qu'il traversait la dure épreuve de son déclin et de sa mise en dépendance au XIXe siècle. Ultime argument complétant sa démonstration, Ben Dhiaf cite les dérives du pouvoir despotique des Hafçides[48].
Les mêmes raisons sont invoquées pour expliquer la fin de la dynastie des Mouradites (XVIIe siècle) “le pouvoir devenant despotique[49]”. Traitant la question de l'occupation d'Alger, en 1830, il occulte les raisons de l'expansion coloniale française et fait assumer la responsabilité au dey Hussein. “Il ne se rendait pas compte, dit-il, de la faible assise de son pouvoir et de la dissolution de la açabiya”, c'est - à-dire la solidarité, la cohésion et l'esprit de corps, sine qua none de la genèse des Etats et de leur consolidation, d'après les théories du pouvoir d'Ibn Khaldoun.. “Les habitants d'Algérie qui constituaient la majorité de la population étaient excédés par la tyrannie des Turcs. Ce rejet qui a atteint son apogée, affaiblit leur amour de la patrie[50]”. Ben Dhiaf, qui met hors de la communauté nationale les Turcs d'Algérie, “ne possédant dans le pays ni une habitation héritée de leurs pères, ni un cimetière où reposent leurs morts, ni tout autre facteur d'attachement à la patrie ...”. Il enrichit son schéma d'explication, par le recours à une nouvelle norme, le sentiment patriotique.
L'étude de la révolte de 1864 permet à Ben Dhiaf de prendre ses distances par rapport au pouvoir beylical et au gouvernement de Mustapha Khaznadar, qui suscitait le mécontentement général.. Il explicite, sans concession, les abus du pouvoir et analyse ses dérives. Après avoir étudié la genèse de l'insurrection, comme réaction immédiate au doublement de la mejba, l'impopulaire impôt personnelle, il rejette la thèse de l'opposition des insurgés à la Constitution. ”Les rebelles, dit-il, ont revendiqué le fondement de la Constitution, c'est-à- dire la sécurité de leurs biens menacés de spoliation, par la lourde charge fiscale. En cas de poursuite militaire, ils assurent leur sécurité, en se défendant. Celui qui en perdra la vie, aura la récompense du martyr[51]”. Il légitime, de fait l'insurrection et condamne sans appel la politique de répression engagé par le gouvernement Khaznadar, faisant valoir que les rebelles se sont montrés attachés à l'esprit de la Constitution, sinon à sa lettre.
- a) Un traité politique : Analysant les événements relatés et les expliquant par les normes du paradigme adopté, il présente son œuvre comme un traité politique. Les Prolégomènes de ses Annales établissent, en effet, le postulat de son analyse critique, en identifiant les différentes figures du pouvoir : monarchie absolue, république, monarchie constitutionnelle. L'influence de Montesquieu est évidente, dans la distinction des trois types de pouvoir et leurs définitions. Néanmoins, Ben Dhiaf enrichit l'arsenal conceptuel du philosophe du XVIIIe siècle, par une recherche laborieuse de références puisées dans le Coran, la Sounna (faits et gestes du prophète) et les écrits des grands oulémas de l'âge d'or. Etudiant le pouvoir absolu, il énonce comme vérité première “qu'il ne peut être exercé que par Dieu” et rappelle que le souverain fait valoir ses points de vue par l'usage de la force, selon “sa perception personnelle de l'intérêt public” alors qu'il “n'est pas infaillible[52]”. Notons cependant que Ben Dhiaf condamne essentiellement les dérives de ce mode de gouvernement, lorsque “des souverains de la période tardive, ont gouverné selon leurs caprices, que cela soit conforme ou non à l'intérêt public[53]”, limitant son exposé à la citation de cas d'espèces. N'osant pas défier le pouvoir beylical en condamnant dans l'absolu ce mode de gouvernement, qui était d'ailleurs institué depuis la fin des premiers califes, il se contentait de dégager les critères du bon gouvernement, selon les normes de l'Islam. Il évoqua même le cas limite de «rupture du contrat» entre le souverain et ses sujets “lors de l'abandon de sa raison d'être, à savoir la justice et la condamnation de toute agression[54]”. En conclusion, il affirme que “le charaa s'oppose à cette mode de gouvernement, car (le souverain) gère les créatures de Dieu et le pays, selon ses caprices”. La condamnation de la monarchie absolue est donc sans appel.
Ben Dhiaf fonde sa réflexion politique, sur l'analyse d'Ibn Khaldoun, considéré comme maître à penser des réformateurs tunisiens du XIXe siècle, présentant d'abondantes citations du chapitre des Prolégomènes, intitulé : “l'oppression annonce la destruction du oumran[55]”. Mettant en exergue l'expression “l'opinion est libre[56]”, la définissant comme postulat des penseurs européens, il la légitime par un retour à la pensée khaldounienne, conjuguant ainsi les références pertinentes, sans exclusive.
Etudiant le régime républicain[57], Ben Dhiaf reconnaît son utilité, étant donné qu'il implique une gestion collective. Il estime, cependant, “qu'il n'est pas compatible avec les règlements en vigueur, chez les musulmans”. Par contre, il exprime ses préférences pour le régime de monarchie constitutionnelle[58]. “Il est, dit-il, conforme au charaa et à la raison”. Il se réfère à l'histoire européenne, idéalise l'expérience constitutionnelle ottomane, conjuguant les références européennes et musulmanes pour critiquer les adversaires de la Constitution, qui la considèrent comme bidaa (innovation) répréhensible. Cette réflexion politique de Ben Dhiaf, légitimant l'adoption des réformes libérales, la justifiant par une relecture du référentiel musulman, l'enrichissant par la connaissance de l'idealtype des Lumières, ouvre de larges horizons aux politiciens, leur permettant de faire face aux défis des temps nouveaux et des mutations du contexte.
Conclusion : L'histoire au service d'une idéologie ? Il serait excessif de l'affirmer. Disons plutôt que Ben Dhiaf a élaboré, grâce à sa prise en compte des défis du contexte, à son adhésion à l'idealtype des Lumières et au recours à la relecture des textes d'autorité par l'ijtihad. un "système d'idées et de valeurs". Apport significatif, il fonde à l'instar de Khéreddine, dans la légitimité de l'universel, le projet de transformation politique. Provenant d'un alim, versé dans les sciences religieuses, ce travail d'insertion de l'universel, dans la civilisation arabe, cette démarche qui prend ses distances par rapport à la pensée dominante peut surprendre. Elle montre le niveau de prise de conscience de l'élite éclairée, à l'heure de l'épreuve.
Hostile à toute attitude mimétiste, Ben Dhiaf sélectionne et adapte, privilégiant les garanties constitutionnelles et les aspects institutionnels. Il rejette ou occulte certains concepts qui lui paraissent prématurés, inappropriés ou hors contexte. C'est ainsi qu'il exclut le modèle du régime républicain, n'évoque point la notion de souveraineté populaire, occulte la pratique du vote. Il s'en tient à la formule consacrée de la choura ou consultation des élites et à la défense des droits de l'homme, menacés par l'arbitraire beylical. Mais la célébration de la liberté et l'affirmation solennelle que “l'opinion est libre” annonce des mutations importantes, dans le cadre de la réalisation de l'idealtype des Lumières, par la prise en compte des nécessités de l'époque et les relectures raisonnées du référentiel qu'elles impliquent. Ben Dhiaf ouvre ainsi l'horizon de la pensée et annonce les grandes mutations de la Tunisie contemporaine.
Chater Khalifa
(Collectif, Entre Orient et Occident : juifs et musulmans en Tunisie, Paris, Editions l’Eclat, 2007, pp. 117 – 132)
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[1] - Ahmed ibn Abi adh-Dhiaf, (vulgo Ben Dhiaf) Ithaf ahl az-zamane bi akhbar tounis wa ahd al-aman (Agrément des contemporains par la relation de l'histoire de Tunis et du Pacte de Sécurité). Première édition, 8 volumes, 1963-1965. Voir t. 4, p. 108. Traduction personnelle.
[2] - D'après le concept de Marx. Voir K. Marx et F. Engels, L'idéologie allemande, Paris, 1960, p. 60 .
[3] - Max Weber, De l'objectivité de la connaissance dans les sciences et la politique sociales (1904), p. 176.
[4] - Voir la définition in CD-Rom Encarta 2000.
[5] - Un séjour de près de quatre ans à Istanbul (1838-1842) lui permet de parachever son enseignement et d'y participer à la vie intellectuelle. De retour à Tunis, il fut chargé d'assurer l'enseignement de la langue arabe, au sein de l'Ecole Polytechnique du Bardo et d'assurer la révision de la traduction des traités militaires occidentaux par ses élèves. Il enseigna à la Zeitouna de 1855 jusqu'à sa mort.
[6] - Voir le texte de la Dibaja in Diwane Kabadou, 2 tomes (Tunis, 1972), voir t. 2, pp. 32 51.
[7] - L'ijtihad, ou recherche de solution, par le recours à la réflexion, dans le cadre d'une lecture du référentiel musulman a permis aux savants de préconiser des solutions aux questions nouvelles, qui n'ont pas été traitées par les textes d'autorité (Coran, hadith etc.) Mais les savants de l'ère du déclin ont occulté cette praxis, se considérant dans l'incapacité de suivre la voie des savants de l'âge d'or. Fait significatif, les réformateurs tunisiens ont recours à l'ijtihad.
[8] - C'est-à-dire consultation juridico-religieuse effectuée par un lettré musulman, versé dans le savoir religieux.
[9] - Mamelouk, d'origine circassienne. Né vers 1825-1830, il arriva à Tunis, en 1840 et fut élevé à la cour beylicale. Il connut une promotion rapide. Il fut nommé ministre de la Marine, en 1857 et Président du Grand Conseil (1861). Après une certaine éclipse, Khéreddine devint ministre dirigeant en 1870, puis premier Ministre (1873-1877). Après sa disgrâce tunisienne, il devint grand vizir à Constantinople, en 1878-1879. Il y mourut en 1890.
[10] - La préface française affirme que le livre est le produit de la “retraite laborieuse”, de Khéreddine, qui correspond à la consolidation du pouvoir du clan autoritaire. “Ne pouvant plus agir, il écrit.”. Elle cite quelques membres de son équipe, “un petit cercle d’amis et de collaborateurs, tels que les cheikhs Salem bou Hadjeb et Moustapha Rodouan, et son secrétaire français, M. Rey”.
[11] - Voir Khéreddine, aqwam al-massalik , fi maarifati ahwal al-mamalik, Tunis, Imprimerie de l'Etat, 1867. Moncef Channoufi a publié une édition critique de l'œuvre, Tunis, MTE, 1972. Voir l'édition française, sous le titre Réformes nécessaires aux Etats musulmans, Paris, Dupont, 1868. Remarquons que cette édition est une traduction partielle, adaptée vraisemblablement au public européen.
[12] - Voir la version française, p. 13 et la version arabe pp. 81 - 87.
[13] - Version française, pp. 12-13 et version arabe pp. 84-85.
[14] - Version française, p. 14 et version arabe pp. 92-94.
[15] - Traduction personnelle, d'après le texte arabe. Ibid., pp. 95 - 96.
[16] - Ibid., p. 116.
[17] - Ibid., p. 99.
[18] - Ibid., pp. 119 - 120.
[19] - Version française, p. 25. La version française se limite à annoncer ce centre d'intérêt. Voir la version arabe, pp. 167-227.
[20] - Appartenant à la tribu des Beni Oun, dans le Nord-Ouest de la Tunisie, Ahmed Ibn Abi adhiaf est né en l'an 1217 de l'Hégire (1803-1804). Il étudia à la Zeitouna. Puis inaugura sa vie professionnelle, comme notaire. Il rejoint, ensuite, l'équipe des rédacteurs de Hussein Bey, fin avril 1827. Depuis lors, il fut chargé d'assurer les correspondances officielles et les circulaires du gouvernement. Il devint un proche collaborateur d'Ahmed Bey et poursuivit son ascension, assurant la rédaction des textes des réformes (abolition de l'esclavage 1842-1846, Pacte Fondamental en 1857), Constitution de 1861 etc. ). Il fut désigné Membre du Grand Conseil. Mais il fut écarté progressivement après l'insurrection de 1864 et la consolidation de Mustapha Khaznadar qui s'en suivit. Il mourut à Tunis le 29 septembre 1974).
[21] - Ithaf, op. cit.
[22] - Ben Dhiaf, op. cit., t.3, pp. 110-111.
[23] - Ibid., pp. 183-184.
[24] - Nahdha : veut dire renaissance. Nous pensons que ce mouvement a été initié en Egypte, sous Mohammed Ali.
[25] - Il était, d'ailleurs, à la recherche des livres arabes imprimés, en vente à Paris. Khéreddine lui acheta L'Histoire d'Ibn Khaldoun et la relation de Paris : Takhlis al-Ibriz fi talkhis Bariz ( Purification de l'or, dans le résumé de Paris)) de Riffaat at-Tahtaoui, qu'il rencontra, à Paris, en 1846.
[26] - L'occupation du sol et sa mise en valeur.
[27] - Ben Dhiaf, op. cit., t.4 p. 99. Traduction personnelle.
[28] - Voir Taïb Annabi, "Wathaiq tounoussiya", Hawliyat al Jamia at-tounoussiya (Les Annales de l'Université de Tunis), n°4, 1967, pp. 153-159.
[29] - Voir le texte de cette circulaire in Ben Dhiaf, op. cit., t. 4, pp. 43-45.
[30] - L'abolition de l'esclavage fut réalisée par étapes (1842 - 1846).
[31] - Voir la lettre écrite par Ben Dhiaf, d'Ahmed Bey au Conseil du Charaa, 26 janvier 1846, in Ben Dhiaf, op. cit., t. 44, pp. 87 - 88.
[32] - Voir notre étude "Islam et réformes politiques, dans la Tunisie du XIXe siècle, in The Maghreb Review, vol. 13, N) 13, 1988, pp. 77 - 83. Voir particulièrement pp. 77-79.
[33] - Ben Dhiaf, fait valoir le respect des droits des non-musulmans, par le statut des dhimmis, qu'il idéalise. Voir Ben Dhiaf, op. cit., t. 4, pp. 259 - 260.
[34] - Alors que les musulmans payaient la dîme ou Zakkat, les Dhimmis étaient soumis à la capitation et au tribut.
[35] - Voir Ben Dhiaf, op. cit., t. 4, pp. 246 - 247.
[36] - Ibid., p. 244.
[37] - Ibid., p. 259. Traduction personnelle.
[38] - Ibid., p. 260. Traduction personnelle.
[39] - Ben Dhiaf approuve ainsi la désignation de Nessim Chemmama, comme Président de la communauté juive. Ibid., t. 5, p. 16.
[40] - Il demande une fetwa au alim Ahmed Ben Hussein, reconnaissant le témoignage du juif, par un recours à l'Ijtihad (lettre du 27 janvier 1860). Voir Taïb Annabi, "wathaiq tounoussiya", op. cit.
[41] - Ibid., p. 85.
[42] - Le principe de séparation des pouvoirs (exécutif, législatif et judiciaire) est formellement reconnu. Une assemblée, constituée par désignation et tirage au sort, investie d'une autorité souveraine, "le Conseil Suprème" assurait une certaine participation des élites au contrôle de la gestion des affaires publiques. D'autre part, la justice relevait désormais des tribunaux. ce qui limitait effectivement le pouvoir du bey.
[43] - Ben Dhiaf, op. cit., t. 4-5, pp. 32 - 38.
[44] - Ibid., pp. 42 - 44.
[45] - Ibid., pp. 44 - 45.
[46] - Voir notre actualisation de la biographie de Ben Dhiaf, in Ithaf ahl az-zamane bi akhbar tounis wa ahd al-aman , 2e édition, Ministère de la Culture, 1999, t. 1, pp. Alif à Sad.
[47] - Ibid., t. 2, pp. 21-26.
[48] - Ibid.
[49] -Ibid., p. 79.
[50] -Ibid., t. 3, pp. 167 -168.
[51] -Ibid., t. 5, p. 125. Traduction personnelle.
[52] - Ibid., t; 1, chapitre : "le pouvoir absolu", t. 1, p. 9.
[53] - Ibid.
[54] - Ibid.
[55] - Ibid., pp. 16-19.
[56] - Ibid., p. 23.
[57] - Chapitre consacré au régime républicain. Ibid., pp. 28 - 31.
[58] - Chapitre consacré à la monarchie constitutionnelle , Ibid., pp. 32 - 71.