Pr. Khalifa Chater

 

La question culturelle : Ayant limogé le ministre de la culture et nommé un intérimaire, le chef du gouvernement a mis la culture en attente. D’ailleurs, elle ne constituait pas une priorité des gouvernements post-révolution. Avec l’interdiction des rassemblements pour cause de coronavirus, les annulations de mariage se multiplient en Tunisie. Les décorateurs, photographes, musiciens et organisateurs sont désormais sans revenus. Les comédiens subissent le même sort. Ces hommes de culture ont observé un mouvement de protestation, lundi 26 octobre, devant le siège du gouvernorat de Tunis, pour revendiquer le règlement des problèmes que connait le secteur. Ils ont également demandé le règlement des arriérés dus aux artistes par le ministère de tutelle. Le lendemain, ils organisèrent un mouvement de protestation devant le palais le ministère des affaires culturelles, pour transmettre leurs revendications. Mais ils furent dispersés par la force. Lundi 16 novembre, ils organisèrent un sit ing à la place Kasba. Vendredi 20 novembre, ils revinrent à la charge, organisant une réunion de protestation, à la cité de la culture.

Les hommes de culture sont ainsi abandonnés à leur sort. En dépit de la réussite de leur création cinématographique et théâtrale, de l’affirmation de leur production artistique et de la promotion de leur musique et la célébrité de leurs rappeurs, ils sont marginalisés. Ils continuent cependant, autant que possible, leurs activités (organisation du quarantième jour de l’anniversaire du décès de l’artiste Naama, participation aux journées cinématographiques de Carthage etc.). Mais leur ministére semble se désintéresser de leurs conditions de vie. Ils sont de fait, marginalisés. Ultime consolation, le budget 2021 prévoit une augmentation de la caisse de couverture sociale au service des artistes. Elle ne peut traiter la question de leur précarité, de plus en plus grande.

Rappelons, pour faire valoir la nécessité de promotion de la culture, cette définition de l’Unesco : “La culture, dans son sens le plus large, est considérée comme l'ensemble des traits distinctifs, spirituels et matériels, intellectuels et affectifs, qui caractérisent une société ou un groupe social. Elle englobe, outre les arts et les lettres, les modes de vie, les droits fondamentaux de l'être humain, les systèmes de valeurs, les traditions et les croyances’’ (déclaration de Mexico sur les politiques culturelles. Conférence mondiale sur les politiques culturelles, Mexico City, 26 juillet - 6 août 1982).

La donne féminine : La question des violences faites aux femmes reste prégnante en Tunisie, malgré une loi votée en 2017 qui punit également toute forme de harcèlement. Près de 65 000 plaintes ont été enregistrées en 2019, selon les derniers chiffres du ministère de la femme, avec quelque 3 700 affaires traitées en justice. Fait grave, le déconfinement, suite à la pandémie, multiplie les violences. D’autre part, dans le cadre de la bipolarité, les droits des femmes sont seulement tolérés par certains acteurs sexistes. Un député, membre du parti Karama a déclaré que “les femmes célibataires sont soit des violées soit des prostituées… et le soi-disant modèle tunisien a engendré l’un des taux de divorce les plus hauts dans le monde…”. Leurs modèles seraient, selon ce député, “les épouses infidèles, les étudiantes allumeuses, les filles ingrates et les femmes de ménage harceleuses”. A juste titre, la présidente du Parti Destourien Abir Moussi dénonça les insultes à l’égard de la femme tunisienne, qui constituent, par ailleurs, une grave infraction à la Constitution. Fait surprenant, la ministre de la femme, présente lors de son discours, n’a pas réagi, tolérant cette dérive. Le gouvernement actuel n’a pris aucune initiative en faveur des femmes, se contentant d’une politique du laisser faire.